LES CAHIERS S.M.T. N°25 - MAI 2011

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Sommaire du Cahier 25

 

 
 
 

PRÉVENTION DES RISQUES PSYCHOSOCIAUX DES ORGANISATIONS DU TRAVAIL

 

VEILLE MÉDICALE EN RISQUES PSYCHOSOCIAUX DU POINT DE VUE DES ORGANISATIONS DU TRAVAIL UN EXEMPLE CONCRET DANS LA MÉTALLURGIE

 
Dominique MARY, médecin du travail
 

Avertissement : le document présenté pour la discussion de pratique en médecine du travail de Veille et d’Alerte pour prévenir les risques des organisations du travail pour la santé est très proche d’un document réel présenté en Comité d’Entreprise et en CHSCT par le médecin du travail. Un certain nombre d’informations ont été modifiées pour en préserver l’anonymat dont les lieux, métiers et années.

 

TROUBLES PSYCHIQUES EN RAPPORT AVEC LE TRAVAIL EN 2009

Concernant la partie quantitative, sont investigués principalement : 

  • les états de souffrance en rapport avec le travail, 

  • les épisodes dépressifs notables en rapport avec le travail, 

  • les états réactionnels aigus en rapport avec le travail, 

  • la démobilisation professionnelle, 

  • les troubles du sommeil en rapport avec le travail.

 Les agents concernés par ces symptômes de psychopathologie au travail et ceux concernés par les rachialgies et TMS en rapport avec le travail sont décomptés, s’ils sont concernés par un symptôme au minimum, comme présentant un risque de pathologie psychosociale d’origine professionnelle.

 On trouvera, dans les pages suivantes une longue partie de commentaires compréhensifs par Section professionnelle de la responsabilité du médecin du travail. L’intérêt éventuel de celle-ci est de permettre, et de rendre visible ce qui n’est considéré souvent que comme des évènements individuels sans liens avec le travail. Il est aussi d’ouvrir des pistes d’interrogation concernant les évolutions possiblement délétères de l’organisation du travail, pour la faire évoluer en un sens plus compatible avec un engagement dans le travail permettant la construction de la santé des hommes et des femmes.

 Le commentaire vaut globalement pour les risques psychosociaux entrainant un risque de psychopathologie en rapport avec le travail. Généralement, c’est le suivi de l’indicateur « Souffrance en rapport avec le travail » qui est pris en compte du fait de sa sensibilité et qui permet ainsi d’appréhender des évolutions, avec toute la prudence nécessaire du fait du faible nombre d’agents dans certaines sections, et du fait des évolutions en nombre et agents dans chacune des sections.

 Cette partie qualitative est rédigée après réinvestigation de l’ensemble des dossiers médicaux individuels des agents en souffrances professionnelles en rapport avec leur travail. De ces données monographiques individuelles en est rédigée une monographie collective par petite collectivité professionnelle.

 EXTRAITS DE L’INVESTIGATION DES RISQUES PSYCHOSOCIAUX AU TRAVAIL EN 2009, PRINCIPALEMENT DES PSYCHOPATHOLOGIES

 Pour les 438 agents suivis en 2009 dans ce secteur professionnel, globalement le risque psychopathologique des organisations du travail pour les agents que nous suivons comme médecin du travail montre une prévalence de 29.2 % et une incidence de 14.6 %.

 En 2008 prévalence 27.5 %, incidence 12.8 % ; en 2007, prévalence 30.3 % incidence 16.7 % ; en 2006 prévalence 27.9 %, incidence 10.8 % ; en 2005 prévalence 27.3 %, incidence 8.6 % ; en 2004 prévalence 29.5 %, incidence 18.4 % ; en 2003, prévalence 23.5 %, incidence 9.4 % ; en

2002 prévalence 29.6 %, incidence 10.2 % ; en 2001 prévalence 36 %, incidence 16.8 % ; en 2000 prévalence 13 %, incidence 7.1 % …/…

SERVICE DE MOYENS SECTION MAITRISE D’OUVRAGE (22 PERSONNES)

Très net apaisement de la situation professionnelle malgré une situation difficile pour l’Outillage logistique début 2009.

  • Le risque psychosocial professionnel en 2009 concerne 18.2 % des agents dont 4.5 % de nouveaux cas. En 2008 concerne 30.4 % des agents dont 17.4 % de nouveaux cas. En 2007 prévalence 34.8 %, incidence 17.4 %.  

  •  Souffrance psychique professionnelle en 2009 : prévalence 13.6 %, incidence 4.5 %. En 2008 prévalence 26.1 %, incidence 8.7 %. En 2007 prévalence 31.7 %, incidence 8.7 %. Certains agents vivent mal de devenir surveillant des prestataires. Certains chargés d’affaire sont très surchargés professionnellement. La pression du temps réel, le découpage objectif des activités n’ont pas favorisé la mise en discussion de règles professionnelles qui permettraient de hiérarchiser l’urgence apparente de l’urgence réelle, qui permettraient de construire les conditions objectives du remplacement et de l’entraide entre collègues. Le développement défensif du « chacun pour soi » fragilise les postures professionnelles collectives et fragilise grandement le travail des collègues restant devant les problèmes de santé individuels dont une partie s’explique par la fragilisation liée à un activisme professionnel sans régulation, activisme professionnel bien utile à l’organisation du travail ! La période de grève a pu avoir des répercussions ultérieures négatives sur le « travailler ensemble ».  

  • Outillage logistique : une alerte de risque psychosocial a été énoncée le 26 mars 2009 pour la section Outillage Logistique de service de moyens. « Le médecin du travail fait alerte pour danger grave et imminent de risque psycho-social du fait des conséquences ‘‘non régulées’’ de dysfonctionnements organisationnels majeurs du ‘‘groupe d’agents de l’outillage logistique’’. Le médecin du travail constate que ces agents trop engagés dans leur travail n’ont plus la possibilité de ‘‘prendre soin de leur santé du fait de leur travail’’. Le médecin du travail recommande :

  •  De supprimer toute activité de travail de mutualisation ou de foisonnement avec les autres activités de la section ‘‘outillage logistique’’, tant que les moyens humains de ce ‘‘groupe d’agents’’ n’auront pas été renforcés. Antérieurement il y avait cinq chargés d’affaire logistique, aujourd’hui moins de trois.

  •  À la direction du service de prendre des mesures objectives et mesurables d’allégement de la charge de travail de ce groupe d’agent.

  •  D’instruire cette alerte de danger grave et imminent pour le groupe outillage logistique en CHSCT. » La confrontation individuelle des agents à la surcharge professionnelle reste très difficile. « Les demandes d’achat peuvent ne pas être validées ». Le vécu d’insatisfaction de ne pas satisfaire professionnellement les collègues persiste. Fin 2009 le médecin du travail constate encore une très forte charge de travail pour la section outillage logistique et a exprimé son inquiétude si un des postes n’était pas remplacé à court terme.

SERVICE DE MOYENS SECTION MÉTHODE (16 PERSONNES)

Dégradation très importante de la situation de cette section qui touche 9 agents sur 16. Difficultés majeures à constituer de nouvelles compétences et à pérenniser les coopérations avec le secteur travaux. Le médecin du travail y fait alerte pour risque psychosocial.

  •  Le risque psychosocial professionnel en 2009 concerne 56.2 % des agents dont 18.7 % de nouveaux cas. En 2008 concerne 35.3 % des agents dont 17.7 % de nouveaux cas. En 2007 prévalence 41.2 % des agents, incidence 23.5 %.  

  •  Souffrance psychique professionnelle en 2009 : prévalence 50 %, incidence 18.7 %. En 2008 prévalence 29.4 %, incidence 5.9 %. En 2007 prévalence 35.3 %, incidence 17.6 %. 2009 : le management en difficulté n’a pas pu trouver une issue aux difficultés multiples et hétérogènes des agents de cette section. La construction nécessaire de nouvelles compétences dues aux départs d’agents s’est faite souvent sans véritable accompagnement et dans de grandes difficultés. Dans ce contexte, certains ont développé un activisme professionnel qui s’est retourné contre leur santé. Certains agents vivent des modifications inachevées de l’organisation du travail comme vident de sens, même s’ils n’ignorent pas qu’une partie est liée au manque objectif de ressources humaines. « Il faut un vrai qui fait quoi ! ». L’hétérogénéité des engagements professionnels, l’absence de moment de véritable discussion sur les désaccords professionnels qui s’accumulent, le désengagement professionnel protecteur de certains, contribuent à casser les coopérations. « C’est ma capacité à me protéger qui va passer devant ! ». Des activités dont sont objectivement responsables des chargés d’affaire de la section ne sont pas dans son périmètre comme les activités puisards. Des agents qui doivent travailler sur les méthodes ne le font qu’à 30 % de leur temps du fait de leur intervention nécessaire sur les multiples activités où ils sont les seuls compétents. « Nos chargés de surveillance sur les échafaudages ne sont pas formés ! ». Plusieurs agents sont en surcharge professionnelle majeure. La nouvelle organisation est perçue concrètement comme ayant aggravé les conditions de réalisation du travail. « Avant on travaillait avec le Technique, maintenant ce n’est plus la même section ! ». De nombreux agents qui se sont très fortement engagés professionnellement sont confrontés à des engagements de reconnaissance professionnelle non tenus « J’en ai marre de former des gens pour des compétences qu’on ne me reconnait pas ! ».Parfois l’espoir n’est que dans la programmation d’un changement de service. Pour les chargés d’affaire combustible la césure des travaux a aggravé la situation des coopérations ordinaires. Certains ont vécu de véritables périodes de surcharge. L’été 2009, les chefs de chargement ont été en difficulté majeure ; il est arrivé que le chef de chargement soit aussi responsable de l’équipe de Fonderie. Certains agents pensent que les « compromis professionnels » liés aux circonstances dégradées ont été dangereux. Ils en ont perdu l’intérêt de leur métier où ils étaient très engagés

SERVICE DE MOYENS SECTION ELECTRO MÉCANIQUE (34 PERSONNES)

La situation d’électromécanique reste toujours très précarisée du fait de passif dans l’organisation du travail. Elle est nettement moins dégradée qu’en 2007, l’incidence de nouveaux agents en difficulté diminuant très nettement.  

  •  Le risque psychosocial professionnel en 2009 concerne 38.2 % des agents dont 8.8 % de nouveaux cas. En 2008 concerne 41.8 % des agents dont 13.9 % de nouveaux cas. En 2007 concerne 64.3 % des agents dont 35.7 % de nouveaux cas. En 2006 concerne 44.1 % des agents dont 14.8 % de nouveaux cas. En 2005, respectivement 51.5 % et 12 %. En 2004 respectivement 52.8 % et 33.3 %.    

  •  Souffrance psychique professionnelle en 2009 : prévalence 26.5 %, incidence 5.9 %. En 2008 prévalence 38.9 %, incidence 8.3 %. En 2007 prévalence 57.1 %, incidence 17.9 %. En 2006 prévalence de 38.2 %, incidence de 8.9 %. En 2005, prévalence 45,4 %, incidence 12,1 %. En 2004, prévalence 41,7 %, incidence 25 %. En 2003, prévalence 36,1 %, incidence 13,9 %. En 2002, prévalence 43.2 %, incidence 5.4 %. En 2001 respectivement 45.9 % et 5.4 %,. En 2000 47 % et 8 %. En 1999 respectivement 41.2 % et 8.8 %. En 1998 32.3 % et 8.8 %.

    2009 : des agents de Commun de site vivent difficilement d’avoir des périodes « sans travail », et d’autres d’être surchargés. Diversifier ces activités avec d’autres tâches redonne goût au travail. La réorganisation de la répartition des tâches des techniciens supérieurs a provoqué des dérégulations du travail : « mon chef voulait me donner une nouvelle mission en plus, j’ai dit non ! ». D’autres agents sont inquiets de presqu’accidents électriques. Les chargés d’affaire sont étranglés dans les spécificités de leurs compétences très spécialisées. « Les personnes compétentes partent ! » « Je vais devoir faire des suppléances pour des travaux où je ne suis pas compétent. » « Je ne suis pas d’accord pour qu’un intérimaire vienne suppléer ma mission très spécialisée ! » La surcharge de travail de certains chargés d’affaire entraîne des somatisations professionnelles invalidantes. Des agents n’arrivent plus à prendre soin de leur santé. Certains agents qui pensent déployer des compétences au-delà de la définition de leur fonction, faute d’être reconnus, envisagent de faire un demande de mutation. Les activités professionnelles des chargés d’affaire se développent dans les petits secteurs où les agents sont solidaires entre eux. « Je n’ai pas confiance en la hiérarchie pour rattraper le coup ! » « Notre maîtrise est perdue ! » Des agents ont l’impression d’avoir un « non management technique ». En 2009, « on a géré au jour le jour : c’était à l’heure prêt ! » La hiérarchie de proximité semble en grande difficulté. Les questions techniques ne sont pas portées de façon homogène. Alors « j’en suis au stade du renoncement ! »

    Nombre d’agents ne comprennent pas le sens de la réorganisation en préparation en 2009. La mise en œuvre du processus de « concertation » concernant la fusion où les agents ont souvent l’impression de n’avoir pas été entendus a laissé des traces.

    La partie « Fonderie » est toujours fragile malgré un très bon collectif de travail. « On ne peut tenir nos exigences. On perd des compétences partout ! » « Je ne devais pas être sur modèle 6, j’y ai été tout le temps. » « On se prive du constructeur de la machine de chargement pour 7 ! » « Il y a un an on a fait des propositions pour changer l’organisation de notre travail. On n’a rien retenu de ce qu’on a proposé. »

SERVICE DE ROBINETTERIE SECTION PRÉPARATION CONTRÔLES, (27 PERSONNES)

Dégradation très importante de la situation fragilisant les collectifs de travail pour laquelle le médecin du travail a fait alerte pour risque grave le 17 février 2009 dans un contexte de difficulté managériale majeure et de déficit de moyens humains et de compétences constituées. Alerte médicale de risque psychosocial maintenue du fait de l’inquiétude majeure sur le renouvellement des compétences et de l’impossibilité de certains agents de protéger leur santé.

  •  Le risque psychosocial professionnel en 2009 concerne 37 % des agents dont 25.9 % de nouveaux cas. En 2008 concerne 33.3 % des agents dont 23.3 % de nouveaux cas. En 2007 concerne 29 % des agents dont une incidence de 25.8 %. En 2006 concerne 14.3 % des agents dont 0 % de nouveaux cas. En 2005, respectivement 33.3 % et 11.1 %. En 2004 respectivement 52.2 % et 17.4 %. En 2003 respectivement 45.9 % et 16.7 %. En 2002 respectivement 46.1 % et 11.5 %. En 2001 respectivement 34.5 % et 31 %, en 2000 respectivement 3.7 % et 3.7 %.  
     

  •  Souffrance psychique professionnelle en 2009 : concerne 25.9 % des agents dont 14.8 % de nouveaux cas. En 2008 concerne 30 % des agents dont 16.7 % de nouveaux cas. En 2007 prévalence 12.9 %, incidence 9.7%. En 2006 prévalence de 10.7 %, incidence de 0 %. En 2005, prévalence 33 %, incidence 11 %. En 2004, prévalence 47,8 % et incidence 8,7 %. En 2003, prévalence 45,8 %, incidence 16,7 %. En 2002, prévalence 46.2 %, incidence 11.5 %. En 2001 34.6 % et 30.7 %. En 2000 respectivement 7 % et 7 %. En 1999, prévalence 7 %, incidence 0 %.

2009 : il y a un sentiment très partagé d’un crise majeure du management de proximité du côté des compétences à apporter, de la compréhension des situations. « Il y a des chargés d’affaire qui gèrent du papier et qui sont très mal par rapport à leurs méconnaissances pour lesquelles ils n’ont pas d’appui ! » « Il n’y a pas de compagnonnage ! » Des agents souffrent d’un déficit majeur d’accompagnement par rapport aux nouvelles tâches qui leur sont confiées. Les difficultés non prise en compte de l’acquisition de compétences déstabilisent les collectifs de travail. « J’estime que ce n’est pas à moi de palier les défauts de compagnonnage d’un collègue ! » « Si je passe préparateur, comment je vais récupérer les compétences nécessaires ? » Il y a une dégradation collective du travailler ensemble, de plus en plus d’agents se refermant sur le secteur qu’ils maitrisent et refusant d’entrer dans le soutien de collègues en difficulté professionnelle qu’ils jugent sans fin. Des agents ont une inquiétude majeure pour le devenir de l’activité qu’ils effectuent. Qui fera le travail demain, une fois que le collègue avec qui on travaille sera parti. « Le bateau dérive ! » De nombreux agents ont le sentiment d’un manque de dialogue, de considération : « On n’a pas les moyens pour réaliser ce qui est annoncé ! » « On signe des chèques en blanc ; on demande des moyens pour avoir des chargés de surveillance, et on n’en met pas ! » « J’écris ce que je ne peux pas faire ! » « La situation s’est considérablement dégradée depuis début 2008. » « On va maintenant appliquer les procédures ! » « Après l’expérience ratée des groupes de travail, je n’ai plus envie de me mettre de l’espoir ! » On n’a plus le temps de pérenniser nos activités. On ne peut plus se mettre à jour. Face aux difficultés professionnelles, certains ont le désir de partir faute de soutien hiérarchique. « Je ne me prends plus le chou ! » « On est montré du doigt pour les ESS. » « Le chef était toujours en conflit et surveillait tout par rapport à des suspicions de tricherie ! » « Sur des documents essentiels, il y en a qui ont signé des documents erronés et ne savaient pas vérifier les vrais ! »

« Les opérations de maintenance 2009, on les a fait à l’arrache ! J’utilise mon. » Les activités de certains agents hors temps réel doivent être abandonnées pour aider les chargés d’affaire en grande difficulté. « Il faut se former sur le terrain avec les professionnels, le système actuel ne le permet pas ! » « Le REX des opérations de maintenance ne se fait pratiquement plus. » La situation est aggravée par les collègues qui se désengagent. « On ne peut plus prendre le temps de mettre à jour les bases de données collectives. Et il y a pourtant dix prestataires qui travaillent dans la section. »

Il y a un manque criant de compétences et de moyens humains. Ainsi sur les contrôles non destructifs, les ressources vont passer de cinq chargés d’affaire à trois chargés d’affaire, peut-être deux. « Pendant les vacances il a été impossible de savoir qui est son remplaçant ! » « Il n’y a pas de vision à court et moyen terme ! » « Le jour de la réembauche, je n’ai pas pu reprendre ! Maintenant je veux que la direction m’écrive ! »

Des agents très expérimentés pour protéger leur santé ne voient pas d’autre solution que de demander à arrêter les opérations de maintenance de tranche. « La parole donnée n’est pas respectée. » « Je n’ai pas envie de partir, mon travail est très intéressant, mais c’est insupportable ! Si cela déborde, c’est de leur faute ! » « La confiance est cassée ! Notre section est déstructurée ! » « Je n’ai plus confiance dans la capacité de l’entreprise de prendre en compte les difficultés professionnelles. » Des agents ont un vécu profond d’injustice par rapport au fait qu’on leur demande sans fin, sans limite. De plus en plus d’agents n’arrivent pas à protéger leur santé dans la période très difficile de maintenance industrielle. De nombreux agents annoncent que la deuxième partie de 2010 sera très difficile du fait de déficits prévus de compétences. Des agents parmi les plus expérimentés et les plus engagés sont atteints par la lassitude et sentent le besoin de se protéger. Mais le désir de partir s’accompagne d’une culpabilité de « lâcher les collègues en difficulté ». De nombreux agents n’ont comme perspective que le départ de la section pour se protéger. La culpabilité de ne pas arriver à bien travailler touche de nombreux agents. Pour certains agents, le rapport au travail est très profondément cassé : « Ici je n’ai plus rien à faire, je n’ai plus envie de bosser. Je ne fais que la partie obligatoire, j’essaie de ne plus aller aux réunions ! ». La souffrance éthique malmène très fortement ces techniciens de haut niveau.

Il y a eu beaucoup plus de troubles du sommeil, de troubles cognitifs en rapport avec le travail, de bouffée d’angoisse en rapport avec le travail nécessitant une hospitalisation et de somatisations professionnelles envahissantes en 2009. La mise en place d’un nouveau management fin 2009 a apporté de l’espoir, et la possibilité que les questions concrètes puissent être écoutées.

Certains agents ne peuvent se résigner à s’isoler et maintiennent les coopérations au risque de leur santé ; il y a risque pour eux. Dans ces conditions très dégradées, le médecin du travail a été très inquiet en 2009 pour la santé de plusieurs agents pour lesquels il a pu craindre un retournement de la violence contre soi. Il a allié alors attitude thérapeutique et socialisation des causes collectives.

Ce risque peut ré-émerger en 2010 devant la conjonction d’incidents techniques, de déficits de compétences suffisantes et disponibles et du rétrécissement des espaces de coopération professionnelle. La dégradation de la situation pour la section contrôle de service de robinetterie explique l’alerte du médecin du travail énoncée le 17 février 2009

« Le médecin du travail fait alerte collective pour risque psychosocial grave pour la situation de la section ‘‘contrôle’’ de service de robinetterie dont la prévalence de pathologie en rapport avec le risque psychosocial touche 33 % des agents dont 23 % de nouveaux cas (en 2007 respectivement 29 % et 26 %, en 2006 respectivement 14 % et 0 %), et pour ce qui est de la souffrance au travail de 29 % et 16 % (en 2007, respectivement 13 % et 10 %, en 2006 respectivement 11 % et 0 %). La situation personnelle (qui a provoqué l’alerte) s’inscrit dans de très graves difficultés organisationnelles de la section contrôle en termes de management, de déficit de compétence en nombre et acquisition, avec une situation qui v se détériorant. Un certain nombre d’agents pour se préserve ou pouvoir continuer à faire leur travail ‘‘s’isolent professionnellement de plus en plus’’. Nombre d’agents on l’impression de ne pas être entendus pas la hiérarchie, l confiance se détériore profondément. Le médecin du travail recommande au chef d’Unité de considérer cette situation collective comme très dégradée et de l’instruire. »

SECTION PRÉPARATION MÉCANIQUE (27 PERS)

Détérioration majeure de la possibilité de travailler à Préparation mécanique sans précariser sa santé. En l’état, sentiment de perte d’espoir de voir prise en compte une situation professionnelle se dérégulant rapidement, encore protégée par une ancienne dynamique de « travailler ensemble » particulièrement riche. Mais elle ne résiste pas devant la disparition des compétences et l’absence de relève. Le médecin du travail y fait alerte médicale de risque psychosocial.

  • Le risque Psychosocial professionnel en 2009 touche 37 % des agents dont 25.9 % de nouveaux cas. E 2008 touche 23.1 % des agents dont 15.4 % de nouveau cas. En 2007 concerne 12.5 % des agents dont 4.2 % de agents. En 2006 concerne 7.1 % des agents dont 3.6 % d nouveaux cas. En 2005, respectivement 10,7 % et 0 % En 2004 respectivement 16.7 % et 10 %. En 2003 respectivement 22.2 % et 3.7 %. En 2002 respectivement 33.3 % et 18.5 %. En 2001 respectivement 21 % et 21 % En 2000 respectivement 0 % et 0 %.  
     

  • Souffrance psychique professionnelle en 2009 touche 25.9 % des agents dont 14.8 % de nouveaux cas En 2008 touche 15.4 % des agents dont 12 % de nouveau cas. En 2007 prévalence 8.3 %, incidence 4 %. E 2006 prévalence de 3.6 %, incidence de 3.6 %. En 2005 prévalence 4 %, incidence 0 %. En 2004, prévalence 10 %, incidence 3,3 %. En 2003, prévalence 22,2 % incidence 3,7 %. En 2002, prévalence 29 %, incidence 14 %. En 2001 22.2 % et 22.2 %. En 2000 prévalence 0 %, et 0 % en 1999.

2009 : malheureusement comme annoncé en mars 2009, la situation du travail s’est très fortement dégradée courant 2009. Le vécu de surcharge de travail est majeur pour les agents. C’est tout Préparation mécanique qui est dégradé. « J’ai rarement vu autant de situations stressantes. Plus on en fait, plus il faut en faire ! » « En opération de maintenance mes nuits sont interrompues, je me réveille spontanément à deux heures du matin. »

« Ce qui m’angoisse ce n’est pas le technique, mais le prescriptif avec des délais de plus en plus courts. On ne nous laisse plus le temps de bien faire notre travail ! » « On se retrouve tous dans des impasses au niveau du boulot. » « On ne peut plus appliquer la réglementation ! » « On a des façons de fonctionner aberrantes ! » « On rentre chez soi le soir et on ne sait plus comment on s’appelle ! » Envahissement du travail, troubles cognitifs. « On ne comprend plus, il n’y a plus d’espoir. Je ne vois pas d’amélioration dans un futur proche ! » « La grève est le révélateur du non dialogue ! »

« J’ai peur que cela casse l’ambiance, le collectif ! » « Mon travail est envahi par tout ce qu’on me demande en plus ! » « Des agents n’osent plus prendre leurs vacances ! Des agents perdent totalement la capacité de préserver  leur santé. » Ils doivent être protégés médicalement le temps qu’ils la récupèrent. « C’est très désorganisé ; on prépare et cela ne peut se réaliser comme prévu. C’est usant ! »

Préparation mécanique est le produit d’une longue histoire d’un collectif de travail harmonieux et compétent qui faisait la force et la fierté de cette section de préparation. Mais : « On ne peut plus faire le travail comme il faut ! » « On essuie le manque d’anticipation hiérarchique. Il n’y a pas de pépinières ! » « Cela me désole de voir un service sacrifié ! » « C’est la désorganisation complète avec une augmentation de la charge de travail en opération de maintenance. » Le transformateur symbolise les problèmes s’accumulant. Les éléments sur ce sujet pour 2010 sont particulièrement inquiétants.

Contrairement aux prévisions, il n’y a jamais eu deux électriciens. Le plan de remplacement des compétences n’est pas connu des agents. Des agents envisagent alors de partir de la section. « Je préfère quitter le bateau plutôt que de continuer comme on va ! » « Si on est mécanicien, on ne peut pas avoir la compétence d’un électricien ! » Des agents vivent comme une injustice qu’on ne puisse pas les libérer d’un poste où ils ont beaucoup donné et où ils précarisent leur santé. « Travailler dans l’urgence tout le temps, cela va cinq minutes ! »

D’autres agents sont bien conscients des risques pour leur santé, mais le principe de réalité du travail les rattrape et ils ne peuvent se protéger. « Tous les quinze jours je regarde la bourse de l’emploi ! » « Ils m’ont dit que si je trouvais quelqu’un pour me remplacer, ils me lâcheraient ! » La lassitude professionnelle se développe massivement. Des agents tentent difficilement de se désengager pour se protéger.

L’histoire collective du travail passé permet aux agents, malgré des atteintes à leur santé différentielles, de garder une compréhension de la responsabilité des déterminants du travail, ce qui fait un peu « contention » face aux risques majeurs pour la santé d’agents qui ne pourraient plus supporter de « mal travailler ». Mais la dynamique collective ne résistera pas s’il n’y a pas de perspective professionnelle humainement supportable.

La surcharge de travail est d’ores et déjà directement responsable d’atteinte à la santé de plusieurs agents : somatisations rhumatologiques handicapantes, effondrement dépressif, bouffées d’angoisse traitées comme urgence médicale, décompensation de pathologie antérieurement bien régulée, manifestations cardiaques devant être explorées. Une accumulation de pathologies de surcharge. La situation du pôle transformateur n’est pas isolée dans préparation mécanique. Elle en est plutôt représentative.

Alerte du médecin du travail pour le Pôle Transformateur de Préparation mécanique portée à la direction et au CHSCT le 28 janvier 2010 : « Le médecin du travail fait alerte collective pour l’ensemble des agents du pôle transformateur et leurs appuis concernant les répercussions individuelles délétères de la surcharge professionnelle en 2009.

Le médecin du travail constate, sauf à ne pas avoir l’information, qu’il n’y a pas de pépinière pour ces activités alors que plusieurs agents sont sur le départ (remarque du 9 juillet 2008).

Particulièrement le médecin du travail constate qu’un seul agent possède actuellement la compétence électrique sur les alternateurs, et que la compétence sur les turbines est fragilisée à court terme.

Le médecin du travail constate que la maintenance industrielle qui devait être préparé à trois chargés d’affaire va l’être avec deux chargés d’affaire alors que la visite type 3 alternateur sera de la responsabilité de préparation mécanique ce qui est nouveau.

Le médecin du travail a eu à gérer plusieurs évènements de santé délétères pour plusieurs agents de ce pôle en 2009.

Le médecin du travail conseille que cet état de fait puisse être instruit par une réunion de mise en débat du constat du médecin du travail par celui-ci avec le collectif de travail, avant instruction par le CHSCT, ou toute autre proposition de ‘‘socialisation’’ compréhensive des difficultés du côté du travail. »

SERVICE PLANIFICATION MÉTHODE

ALERTE de risque psycho-social majeur pour le Service Planification méthode de décembre 2009 :

« Le médecin du travail fait alerte pour risque de danger grave pour la santé des agents, pour l’ensemble de PLANIFICATION MÉTHODE. Nombre d’agents sur-engagés professionnellement ne sont plus en situation de préserver leur santé. Cette situation est plus visible pour la planification, moins visible pour le ‘‘Projet’’ constitué majoritairement de cadres ; et pourtant la situation de ces derniers est encore plus inquiétante du point de vue du médecin du travail compte tenue de leur situation spécifique.

Au-delà des atteintes psychiques, de véritables risques graves pour la santé peuvent se déployer particulièrement du point de vue cardiaque. Cette organisation ne dispose d’aucune marge de manœuvre. Les conditions objectives de mise en place du système organisationnel de planification en temps réel, dont des aspects pourraient être protecteurs pour les cadres qui ne peuvent jamais décrocher du travail, risque en l’état d’aggraver la situation ».

  • Méthode (22 pers.)

Fragilisation qui perdure et inquiète du fait des contraintes de disponibilité personnelle majeure et d’engagement excessif dans le travail pour la troisième année. Cette situation perdurant, la population de cadres perd la capacité de préserver sa santé au travail. Le niveau d’atteinte à la santé doit être appréhendé en prenant en compte la situation spécifique de l’encadrement qui ne donne pas à voir généralement ses difficultés de travail  

  •  Le risque psychosocial professionnel concerne en 2009 22.7 % des agents (6), dont 9 % de cas nouveaux (2). En 2008 22.7 % des agents dont 13.6 % de cas nouveaux. En 2007 concerne 23.8 % des agents dont 19 % de nouveaux cas. En 2006 concerne 4.8 % des agents dont 0 % de nouveaux cas. En 2005, respectivement 9.5 % et 4.8 %. En 2004 respectivement 4.8 % et 0 %. En 2003 respectivement 0 % et 0 %. En 2002 respectivement 10.7 % et 3.6 %. En 2001 respectivement 23 % et 7.7 %. En 2000 respectivement 0 % et 0 %.  
     

  • Souffrance psychique professionnelle : concerne en 2009 22.7 % des agents (5) dont 9 % de nouveaux cas (2). En 2008 13.6 % des agents dont 9 % de nouveaux cas. En 2007 prévalence 14.3 %, incidence 4.8 %. En 2006 prévalence de 4.8 %, incidence de 0 %. En 2005 respectivement 9.5 % et 4.8 %. En 2004 respectivement 5.9 % et 0 %. En 2003 respectivement 0 % et 0 %. En 2002 respectivement 8 % et 4 %. En 2001 respectivement 8 % et 4 %. En 2000 respectivement 22.2 % et 0 %.

    2009 : contenu de l’alerte du 3 décembre 2009. Très forte charge de travail des chefs d’arrêt de projet d’opération de maintenance et de sous-projet. La situation en 2009 a encore été plus difficile qu’en 2008. Certains agents sont culpabilisés de ne « pas tenir » face à des contraintes humainement beaucoup trop sollicitantes qui envahissent toute leur vie. Ils peuvent perdre la capacité à pouvoir protéger leur santé. Il est impossible de prendre du recul en maintenance industrielle. « Au bout du bout, tout le monde compense partout ! » « Il n’est pas possible d’oublier le travail des hommes, même si on manage l’arrêt. » « L’opération de maintenance fonctionne parfois, avec des dates d’échéance dont tout le monde sait qu’il est impossible qu’elles soient tenues ! »

    Les situations de suppléances de collègues se sont multipliées en 2009, perturbant gravement les activités de préparation un peu en recul. Les collègues de services centraux qui interfèrent avec les opérations de maintenances ont eux-mêmes inquiets des situations humaines qu’ils rencontrent à PLANIFICATION MÉTHODE du fait de la surcharge de travail.

    Les nouvelles situations où il y a eu deux opérations de maintenance en parallèle, faute d’organisation humaine pouvant faire face à ces situations, a entraîné chez certains le sentiment de « mal travailler » dans des activités où le plaisir au travail était anciennement présent.

    Pouvoir « bénéficier » de congés dans une perspective de préservation de sa santé est une véritable difficulté qui écartèle les agents entre laisser des collègues et une situation industrielle en grande difficulté et devoir se préserver. Il y a une impossibilité en opération de maintenance de quitter psychiquement le travail, celui-ci envahit leur activité cognitive. L’opération de maintenance reste présente tant par les sollicitations directes à domicile une fois le travail terminé malgré une très longue journée de travail, que par le fait que les activités continuant, il est impossible aux chefs de projet ou de sous-projet de ne pas en accompagner par la pensée le déroulé, quand ils ont quitté le site.

    Pour l’année 2010 en VP par exemple, le déficit de compétences disponibles est tel qu’il n’y aurait qu’un seul responsable par secteur. Le système de planification informatique est tellement rigide qu’il détourne le travail des responsables de leur finalité.

     Il n’est pas d’autres solutions pour leur permettre de préserver leur santé et de recouvrer pour certains la capacité de la protéger, que le relais de leur travail, une fois qu’ils ont quitté le site, puisse être pris par un autre collègue. Certains de ces agents ont perdu la capacité littéralement de prendre soin de leur santé tant leur engagement professionnel envahit leur fonctionnement mental. Les nombreuses situations perturbées rencontrées en 2009, la plus grande difficulté d’un certain nombre d’acteurs de la maintenance dont certains n’ont pas encore constitué toutes les compétences nécessaires, les situations précarisées de nombre de prestataires en difficulté réelle par rapport à des situations concrètes de travail, font que ces responsables pensent qu’ils sont indispensables, non seulement pour faire avancer le projet, mais aussi pour permettre aux collègues de pouvoir simplement faire leur travail.

    Ce sont ces bases objectives de ce sur-engagement professionnel, au service d’une organisation du travail qui ne les protège plus, qu’il faut profondément réorganiser, avec à l’évidence, des moyens humains plus importants, pérennes, qui puissent suppléer aux évènements de santé délétères qui s’accumulent. La mise en place expérimentale du système organisationnel de planification en temps réel nécessiterait que l’ensemble des postes soient gréés et que les collègues en renforts, au-delà des compétences aient le temps de s’approprier l’arrêt. Sinon les responsables en place ne peuvent que constater que cette mise en place qui voulait apporter une aide objective, accroît au contraire leurs propres contraintes. « Le système organisationnel de planification en temps réel n’est pas fait pour fliquer, mais pour aider ! »

    Dans la situation de collègues malades du fait de ces contraintes, les mécanismes de suppléance entrainent une série de conséquences délétères en cascade, puisque le travail auquel était affecté ces collègues suppléants ne peut être effectué correctement, ce qui renforce le vécu de situation dégradée. À l’évidence cette organisation ne dispose d’aucune marge de manœuvre, et les coûts pour la santé ne peuvent que s’accroître. La situation et posture de cadre rend cette dégradation pour la santé peu visible pour la collectivité de travail, et plus grave, pour eux-mêmes.

  • Planification (17 pers.)

Dégradation augmentant depuis deux ans, expliquée par la surcharge de travail en rapport avec les lourdes perturbations de Maintenance industrielle, la mise en place d’un outil informatique qui entrave le travail, le non remplacement d’absents, et l’inquiétude pour l’avenir liée à des futurs horaires de travail très contraignants

  •  Le risque psychosocial professionnel concerne en 2009 35.3 % des agents (6) dont 17.7 % de nouveaux cas (3). En 2008 23.5 % des agents (4) dont 17.7 % de nouveaux cas (3). En 2007 concerne 6.3 % des agents sans nouveau cas. En 2006 concerne 26.7 % des agents dont 26.7 % de nouveaux cas. En 2005, respectivement 6,7 % et 6.7 %. En 2004 respectivement 12.5 % et 6.2 %. En 2003 respectivement 31.2 % et 6 %. En 2002 respectivement 26.3 % et 15.8 %. En 2001 respectivement 27.3 % et 0 %. En 2000 respectivement 0 % et 0 %.
     

  •  Souffrance psychique professionnelle : concerne en 2009 29.4 % des agents (5), dont 17.6 % de nouveaux cas (3). En 2008 11.8 % des agents dont 11.8 % de nouveaux cas. En 2007 concerne 6.3 % des agents sans nouveau cas. En 2006 prévalence de 20 %, incidence de 20 %. En 2005, prévalence 7 %, incidence 7 %. En 2004, prévalence 12,5 %, incidence 6 %. En 2003, prévalence 31,3 % incidence 6,2 %. En 2002, prévalence 26.3 % et incidence 15.8 %. En 2001, 10.5 % et 0 %. En 2000 26.3 % et 0 %.

    2009 : contenu de l’alerte du 3 décembre 2009. Les différentes figures d’organisation de la planification en période Maintenance industrielle, prestée ou non, avec ou non un préparateur de l’entreprise ont pu avoir des conséquences déstabilisantes du fait que ces organisations n’avaient pas du tout la souplesse nécessaire face au bouleversement permanent des plannings de Maintenance industrielle. La planification malgré les prolongations des arrêts a été faite à moyens constants.

    Les savoir-faire pour ne pas avoir sa vie privée envahie cognitivement par le travail sont très perturbés. « La nuit, c’est fini à 4 heures, je suis au boulot ! » « 2009, c’est la pire année ! »

     Malgré une activité hors arrêt de tranche, les difficultés ont été présentes au plateau de planification maintenance – exploitation du fait de déficit de personnes non remplacées pendant six mois. Les fins de réunion de validation de planning ne sont pas respectées 16 h) par certains responsables d’exploitation, ce qui entraîne l’impossibilité de finir sa journée à 17 h.
              Ces situations de déséquilibre entrainent une hyperactivité professionnelle possiblement déstabilisante pour les coopérations professionnelles, ouvrant à un activisme professionnel de certains, coûteux pour ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas suivre à ce rythme. Les situations professionnelles difficiles peuvent ne plus être hiérarchiquement arbitrées.

    Nombre d’agents ressentent difficilement l’augmentation des exigences professionnelles. Certains voient se multiplier les phénomènes de somatisations professionnelles.

    La perspective de devoir travailler en 2X10 au système organisationnel de planification en temps réel déstabilise les agents et fragilise les coopérations. Les cadres organisationnels de cette réforme étant changeants et non pérennes entre ce qui est dit localement et remodifié nationalement font perdre confiance. La non adhésion à ce projet entraîne une très forte fragilisation de son avenir professionnel qui accroît le vécu délétère des réorganisations.

     L’emploi de l’outil informatique est très difficile et perturbe de façon importante le travail. « Avec l’outil informatique, on ne faisait plus notre travail, mais seulement faire fonctionner le logiciel ! » « Avec l’outil informatique, on perd les repères ! » Et l’outil informatique ne serait pas compatible avec l’outil informatique plus global, alors pourquoi l’avoir déployé prématurément ? « Il faudra encore une fois tout réapprendre. »

    Ce qui est inquiétant dans cette situation, c’est qu’il n’y a pas de situations de désengagements professionnels défensifs. Ceci est lié à la très forte pression du temps réel qui mobilise trop fortement l’engagement dans le travail et ne permet pas de prendre du recul et de protéger sa santé. Ne pas pouvoir tenir face au vécu de surcharge, l’inquiétude des nouvelles contraintes horaires majeures du travail en deux fois dix, (dont un éventuel quart de 16 h à 3 h du matin !) ne laissent comme perspective pour certains que le départ. Des choses sont annoncées organisationnellement, et après elles sont contre dites, ce qui malmènent tous les acteurs.

CONCLUSION

L’indicateur global de risque psychosocial en rapport avec les organisations du travail construit par le médecin du travail, en 2009, est encore très élevé en ce qui concerne l’effectif de Maintenance, mais très légèrement moins qu’en 2007. Mais les causes en sont différentes : c’est maintenant « l’organisation ordinaire du travail de la Maintenance » qui est clairement fragilisée et responsable des évènements délétères qui croissent et vont aller croissant sans d’énergiques mesures de prévention qui doivent impacter les moyens et la  politique sociale.

Sont concernés par un risque « psychopathologique » en rapport avec leur travail 29.2 % des agents suivis médicalement (128/414 agents), (30.3 % en 2007), avec comme particularité que les nouveaux cas pour l’année 2009 représentent 14.6% des agents, 64/414, (16.9 % en 2007).

 Il y a une petite amélioration d’une situation qui n’avait jamais été aussi détériorée qu’en 2007. En 2009 :

  • 1.6 % des agents, 7 sur les 414 que je suis médicalement, présentent une dépression professionnelle moyenne ou grave, en rapport avec le travail, dont un nouveaux cas.

  • 22.6 % des agents présentent une souffrance professionnelle.

  • 1.6 % (3 % en 2007) ont présenté une décompensation psychopathologique aiguë en rapport avec le travail à type de stress post-traumatique soit 7 agents (au lieu de 12 agents en 2007).

  • 5.02 % des agents soit 22, (8,5 % en 2007), présentent des troubles rhumatologiques, principalement rachidiens (3.4 %), parfois des TMS (1.6 %), qui sont des somatisations professionnelles de « surcharge » qui les invalident et dont la cause est clairement la surcharge travail.

  • deux agents ont présenté deux épisodes cardiaques graves que le médecin du travail met directement en lien avec le travail.

 Le médecin du travail acte qu’on est définitivement sorti semble- t-il d’un épisode dramatique de harcèlement institutionnel. Mais que ce qui déstabilise la santé des agents a à voir avec les évolutions de l’organisation du travail dans ce secteur de la métallurgie qui allient une intensification du travail, une imprévision du remplacement des compétences partant en retraite, une quasi absence de pépinière en Maintenance pour pallier à ces départs et prévoir les temps de compagnonnage nécessaire.

 Il est symptomatique de noter que :

  • Les secteurs des travaux de terrain semblent liés à une disparition programmée ; ce contexte entraîne une difficulté à se projeter de façon fiable dans l’avenir professionnel et tout autant à pouvoir réaliser concrètement son travail d’aujourd’hui. Cela malmène nombre d’agents qui n’ont pas d’autre choix selon eux que de partir ou évoluer, ou de se désengager professionnellement pour se protéger du mécanisme délétère que cela génère.
     

  • Les secteurs de la Préparation et Méthode sont de plus en plus en surcharge professionnelle, et que cette situation est à l’origine de l’apparition de véritables « pathologies de surcharge » nécessitant des interventions de « sauvegarde de la santé » par le médecin du travail pour les agents concernés. La difficulté médicale en a été de ne pas victimiser ou handicaper à l’excès les agents, mais plutôt de leur permettre de réacquérir la capacité de prendre soin de leur santé pour se réengager professionnellement sans risque pour leur santé.

Ceci explique, comme l’indique le détail de la Veille médicale en risques psychosociaux des organisations du travail pathogènes rapportée dans ce rapport, que je fais donc Alerte comme médecin du travail dans ce Rapport Annuel Médical pour « Risque Psychosocial important »:

  •  pour la section Méthode du Service de moyens ;

  •  pour la section Préparation Contrôles du service de Robinetterie ; 􀂾 pour la section Préparation mécanique du service Mécanique ;

  •  pour le Service Planification méthode.

Le site industriel est maintenant confronté à une très grave crise de l’organisation du travail qu’on retrouve semble-t-il sur les autres Unités du territoire, pour laquelle la non anticipation du départ d’une génération de Maintenance est première.

Comme énoncé il y a un an, constatons que les agents sont :

  •  surchargés de travail ;

  • le déficit de compétences constituées au long des années se fait de plus en plus sentir ;

  •  il n’y a pas de vraie pépinière, de compagnonnage digne de ce nom ; l’urgence productive déborde les meilleures bonnes volontés ;

  •  la hiérarchie est trop souvent impuissante à pouvoir apporter un appui conséquent en termes de moyens ; elle est très souvent en situation d’injonction paradoxale, plus elle « comprend » les problèmes du côté du rôle des organisations du travail qui s’asphyxient progressivement, plus elle en est malmenée psychiquement ;

  •  la politique dite de « Renoncement » est désastreuse en terme de conception du « beau travail » et provoque une grave crise du sens du travail et des incompréhensions incommensurables ;

  •  la conscience d’avoir été complice d’actes qu’on réprouve du côté du « beau travail » provoque la honte de leurs actes pour certains agents, les conséquences délétères en étant catastrophiques alors.

EN PRATIQUE

Quel(s) usage(s) dans l’espace public interne de l’entreprise de la veille en consultation individuelle à l’analyse collective des dossiers médicaux ?

Le médecin du travail peut donner à voir et ébaucher des pistes de compréhension de l’évolution concrète des organisations du travail potentiellement délétères, en rendant compte des affects douloureux de petites collectivités de travail, avec ses notes cliniques recueillies au fil des consultations et un système de veille quantitatif. L’activité de travail et les rapports sociaux de travail sont ainsi interrogées, ce qui peut ouvrir à la compréhension des différents acteurs.

Dans les faits cette veille est présentée chaque année de façon détaillée en Comité d’entreprise et le débat qu’elle provoque tracé à son Compte rendu, à l’occasion de la présentation du Rapport annuel du médecin du travail. Parfois elle est présentée en CHSCT si les opportunités ou la gravité de situations l’exigent. À l’occasion d’alerte médicale importante du point de vue du médecin du travail, celle-ci est « tracée » par courrier au président et au secrétaire du CHSCT pour instruction d’un éventuel danger collectif qui pourrait relever d’une imminence de danger si des mesures conservatoires n’étaient pas mises en œuvre. Dans de telles circonstances il a pu être proposé que le médecin du travail présente lui-même l’argumentaire de son alerte médicale au collectif de travail concerné. Le projet n’est pas alors d’ouvrir le débat sur la gravité médicale collective qui relève de la responsabilité et de la professionnalité du médecin du travail, mais sur ce qui fait difficulté concrètement dans les organisations du travail concernées, en le ciblant sur la validation et le développement de pistes de compréhension..■;

 

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