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L'association SANTÉ ET MÉDECINE DU TRAVAIL a pour objet de développer une réflexion et de permettre un échange sur les pratiques professionnelles et leurs conséquences scientifiques, sociales et éthiques pour agir sur l'évolution de la médecine du travail. Elle est ouverte aux médecins du travail et aux spécialistes scientifiques et sociaux se préoccupant de la médecine du travail.
La SMT fait partie des membres fondateurs de E-PAIRS.

 

 
6 Février  2014

Prendre du recul :

Examiner de plus près la nature et le fonctionnement des juridictions ordinales

Par le coordonnateur de la pétition le Dr Alain carré

 

Soutien au Docteur Jean Rodriguez psychiatre du service public hospitalier attaqué devant l’ordre par l’enseigne de décoration Zôdio du groupe Mulliez. L’ordre des médecins appliquant la loi Bachelot de 2009, le poursuit maintenant directement sans aucune instruction autonome, sans l’aval d’une autorité régalienne, reprenant tous les arguments de l’employeur à son compte. Il est convoqué le vendredi 14 février devant la chambre disciplinaire ordinale de Marseille à 9h30

 http://csdr84.net /. Soutenons-le !

Soutien au Docteur Nathalie Pennequin médecin du travail expérimentée de la RATP, que la RATP veut faire taire pour qu’elle n’instruise plus le lien santé-travail, au nom de soi-disant patients fictifs qui ne portent pas plainte eux-mêmes devant l’ordre des médecins. Malgré cette illégalité flagrante, l’ordre des médecins a reçu la plainte, et organisé une pseudo conciliation-menace sans aucun des patients, à laquelle elle ne s’est pas rendue pour préserver son indépendance professionnelle.

Voilà pour les nouvelles affaires publiques.

Les employeurs instrumentalisent l’ordre des médecins pour échapper à leurs responsabilités judiciaires, en portant plainte contre les médecins du travail produisant des écrits (ou des actes) qui leur sont défavorables.

C’est comme si les syndicats portaient plainte à l’ordre des médecins contre un médecin du travail, parce qu’il n’arriverait pas à faire prendre par l’employeur des mesures nécessaires dictées par son obligation de sécurité de résultat.

L’ordre des médecins ne peut devenir l’arbitre de l’applicabilité des avancées sociales du droit (droit du travail et code de la sécurité sociale pour déclarer les MP).

Dans la mesure où nous avons appris que cinq médecins du travail en une année, deux psychiatres et deux généralistes ont à répondre de plaintes devant le conseil de l’ordre fomentée par les employeurs, nous estimons que ces plaintes sont probablement plus nombreuses mais que nous ne les connaissons pas toutes, les médecins ayant cédé en conciliation ne le diffusant pas.

Nous sommes confrontés à une offensive concertée du patronat qui vise les médecins du travail les plus actifs (collectif des médecins du travail de Bourg en Bresse, association SMT) et qui porte actuellement sur les risques psychosociaux mais pourrait s’étendre aux certificats de maladies professionnelles.

Nous avons ainsi appris qu’un responsable de chaire de pathologie professionnelle a été poursuivi devant l’ordre de Paris par une société d’ascenseurs pour un certificat de maladie professionnelle, pour une maladie liée à l’inhalation de poussières d’amiante chez un ascensoriste. La plainte aurait été retirée après intervention du syndicat patronal et des excuses auraient été faites. Cela démontre que très probablement l’épidémie de plaintes est concertée et organisée par les employeurs.

Les médecins du travail qui restent fidèles au rôle qui leur est assigné, ont développé collectivement un soubassement théorique, issu des sciences sociales, leur permettant des pratiques diagnostiques du lien entre la santé et le travail et plus précisément entre des caractéristiques de l’organisation du travail et leurs effets, notamment sur la sphère

psychique. Leurs diagnostics du lien santé travail, qu’ils ont le devoir et l’obligation de consigner par écrit, lequel est accessible au travailleur concerné, sont directement un risque juridique majeur à la fois assurantiel, contractuel et potentiellement pénal pour les employeurs. Il est donc essentiel pour les employeurs de « sécuriser » leur responsabilité en faisant définitivement taire les plus enclins et par conséquence à terroriser les autres afin de les dissuader de rendre visible ces diagnostics.

C’est dans ce contexte très défavorable qu’il faut interpréter les plaintes d’employeurs auprès des juridictions professionnelles de l’Ordre des médecins.

En effet, les recours possibles au juge judiciaire seraient immédiatement contre-productive dans la construction de l’invisibilité recherchée : elles rendraient largement publiques ce que les employeurs espèrent cacher, mais surtout elles instruiraient judiciairement le conflit dans le cadre juridique et réglementaire défavorable à la partie patronale.

Nous ne mésestimons pas l’existence de caractéristiques qui tiennent à l’origine à la fois historique, politique et sociale de l’Ordre des médecins et qui en font un instrument favorable à la stratégie poursuivie par les employeurs, notre propos est ici plutôt d’examiner le fonctionnement des juridictions pour construire une critique rationnelle et opératoire afin d’en tirer des conclusions en matière d’action pratique.

Ainsi:

  • Le décret modifiant le code de la santé publique et réorganisant les plaintes au conseil de l’ordre du 25 mars 2007 a été modifié le 14 avril 2007 en y ajoutant le mot « notamment » pour faciliter les plaintes d’employeur contre un médecin devant une juridiction de l’ordre des médecins [1]

  • le filtre que représentait une autorité publique, pour des plaintes (d’employeur ou autre) à l’encontre des médecins du service public, peut maintenant être contourné, instituant l’Ordre des médecins lui-même en arbitre “social”, ce qui renforce de façon majeure son pouvoir « d’intervention sociale », sans que personne ne s’en soit rendu compte. Cet « arbitre » ignore le droit du travail, assimilant volontairement le travail à la famille et aux contraintes déontologiques qui y seraient liées.

Or, les juridictions professionnelles de l’Ordre des médecins fonctionnent comme des juridictions d’exception puisqu’elles s’exemptent des principes juridiques et réglementaires habituels.

Notamment, elles dérogent aux principes de séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire qui préside au fonctionnement d’une démocratie.

L’ordre des médecins détient ainsi tous les pouvoirs pour intervenir sur la question sociale d’un point de vue partisan et illégitime:

Concrètement ces juridictions ordinales :

  •  édictent leur propres règles législatives, ici le principe qu’il est interdit de faire le lien par écrit entre des étiologies professionnelles et leur effets sur la santé du salarié (rapport de 2006 sur les certificats médicaux). Rien dans le code de déontologie ne permet d’instruire des commentaires concernant l’exercice de la médecine du travail. Qu’à cela ne tienne ! l’ordre a inventé une grille de lecture (ses commentaires issus de ses jurisprudences partisanes jamais contestées) qui assimilent l’entreprise à une famille.

  • poursuivent directement, comme exécutif en prétendant administrer la profession de médecin et en se joignant à la plainte des employeurs ou en s’y substituant pour contourner les règles qui s’appliquent aux médecins assurant un service public

  • jugent comme tribunal les plaintes qu’elles ont suscitées en appliquant des règles qu’elles ont édictées. Les jugements ne sont plus fondés sur la lettre du code de la santé publique, mais sur les commentaires partisans et tendancieux de l’ordre des médecins.

La procédure elle-même recèle une inadaptation flagrante. Prévue pour un conflit entre un médecin et son patient, elle ne peut être appliquée à un conflit entre un employeur et un médecin. Ainsi :

L’ordre ne procède à aucune véritable analyse juridique de la recevabilité de la plainte d’un employeur alors que juridiquement elle ne va pas de soi. Notamment, ces juridictions ne vérifient pas, comme le fait un juge d’instruction ou un procureur, la réalité des faits allégués par l’entreprise plaignante.

L’ordre organise une « conciliation » obligatoire entre l’employeur et le médecin du travail alors que la réglementation interpose, dans l’hypothèse de désaccords, la tutelle administrative de l’institution (inspection du travail), pour protéger l’indépendance du médecin du travail.

Lors de cette « conciliation » employeur et médecin sont en situation d’inégalité de traitement et de moyens de défense. En effet lors de la “conciliation ordinale” contrairement à la conciliation prudhommale l’employeur agit pour ses propres intérêts (il est mis en cause devant une juridiction prudhommale ou pénale par le patient du médecin), alors que le médecin agit pour les intérêts de la santé de son patient.

Or, cette « conciliation », pour aboutir, impose au médecin de « s’expliquer » sur ses pratiques au regard d’un cas singulier, celui du patient, au péril du secret professionnel, et éventuellement à modifier ou à renoncer à un écrit, hors de la présence du patient que cela concerne, ce qui est interdit par la déontologie.

De plus cette « conciliation » tient lieu pour l’ordre de pseudo audition, dans le cas d’un médecin du service public. Cette “audition” par l’ordre, subordonnée, est contraire à la déontologie médicale

La transmission de la plainte à la chambre disciplinaire régionale est automatique et ne comporte pas de véritable instruction, a fortiori, si le médecin a refusé la conciliation, car le médecin n’est pas personnellement entendu, hors de la présence de l’employeur, par l’échelon ordinal de réception de la plainte.

Cette fausse « instruction » comme les éléments de synthèse de la chambre disciplinaire ainsi que les « références » émanant de l’échelon national de l’ordre dépassent les limites de compétence de l’institution limitée à la déontologie médicale et imposent des pratiques médicales qui ne relèvent pas de la déontologie médicale. L’argumentaire avancé par les avocats des employeurs citent, tous sans exception, des éléments d’un rapport de 2006 approuvé par l’Ordre national qui illustre parfaitement ce travers [2]

 Comment s’étonner par conséquent que les employeurs instrumentalisent les juridictions professionnelles de l’ordre des médecins, dès lors qu’un écrit d’un médecin et notamment d’un médecin du travail ne leur est pas favorable. Soit le médecin se rétracte en conciliation, soit il est condamné à coup sûr par la juridiction professionnelle.

Nous sommes confrontés à un système absurde de plainte ou toute plainte de plaignant illégale et illégitime conduit, via une pseudo instruction qui repose sur la menace et la peur, à un résultat bénéfique pour l’auteur de la plainte illégale, toujours ici un employeur confronté à des procédures prud’homales ou pénales ou à des actes professionnels relevant de l’indépendance du médecin du travail. Il n’y aucun arbitre de ces abus de recevabilité en droit.

Dans le tout petit milieu de la médecine du travail la peur gagne du terrain, car écrire sur le lien santé travail pourrait être dangereux et le silence s’imposerait dorénavant. La prévention médicale des risques professionnels et de leurs effets serait morte.

Il est urgent que :

  • soit mis un terme à la possibilité pour les employeurs de se pourvoir devant les juridictions de l’ordre des médecins, en faisant pression sur le gouvernement afin que la loi précise expressément cette impossibilité notamment concernant les médecins du travail

  • que, pour les médecins du travail, la mise en cause soit précédée par une instruction des autorités de tutelle et du contrôle social des services de santé au travail.

  • et qu’une réforme des juridictions ordinales les rende enfin conformes aux principes du Droit.

 Alain CARRE

Téléchargez le texte

 

[1] L’article R 4126-1 du code de la santé publique traite de « L'action disciplinaire contre un médecin, un chirurgien-dentiste ou une sage-femme ne peut être introduite devant la chambre disciplinaire de première instance que par l'une des personnes ou autorités suivantes :

1° Le conseil national ou le conseil départemental de l'ordre au tableau duquel le praticien poursuivi est inscrit à la date de la saisine de la juridiction, agissant de leur propre initiative ou à la suite de plaintes, formées notamment par les patients, les organismes locaux d'assurance maladie obligatoires, les médecins-conseils chefs ou responsables du service du contrôle médical placé auprès d'une caisse ou d'un organisme de sécurité sociale, les associations de défense des droits des patients, des usagers du système de santé ou des personnes en situation de précarité, qu'ils transmettent, le cas échéant en s'y associant, dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 4123-2 (…)

[2] Extrait du rapport « certificats » du CNOM (2006) : « Lorsque le médecin se voit demander expressément par le patient de mentionner l'affection dont il souffre, il doit être particulièrement prudent. A la lettre, rien ne le lui interdit puisqu'il n'y a pas de secret entre le patient et le médecin. Le plus souvent, ces certificats sont destinés à être versés dans des procédures en cours: divorce, contestation devant le conseil des prud'hommes, ... pour démontrer que la situation vécue en couple, en famille, en milieu professionnel ... , était si intolérable qu'elle a affecté l'état de santé de la personne et doit être réparée. Le médecin doit convaincre le demandeur qu'il n'est pas de son intérêt à terme de livrer une telle information qui circulera tout au long de la procédure et dont rien ne permet d'affirmer qu'elle ne lui sera pas opposée plus tard. S'il accepte néanmoins de délivrer ce certificat, le médecin devra être très prudent dans la rédaction. ll lui est interdit d'attester d'une relation causale entre les difficultés familiales ou professionnelles, . et l'état de santé présenté par le patient. Il n'a pas non plus à « authentifier» en les notant dans le certificat sous forme de « dires» du patient les accusations de celui-ci contre un tiers, conjoint ou employeur. »

 

20 Janvier 2014

Après « sanction » :

Analyse de la situation du coordonnateur de la pétition  le Dr Alain carré

 

 Le Dr HUEZ est sanctionné par un avertissement par la Chambre disciplinaire du conseil de l’ordre de la Région Centre.

Passons sur le fait que, dans cette juridiction « spéciale », le simple déclaratif suffit à valider des affirmations de la partie patronale alors que, dans une juridiction judiciaire, cela impliquerait l’enregistrement des pièces qui les prouvent. Permissivité d’un côté, sévérité de l’autre.

Ce qui frappe ici est l’inconsistance des considérants sur les deux questions de droit essentielles :

  • Un conseil de l’ordre peut-il recevoir une plainte d’un employeur agissant pour la défense de ses propres intérêts contre ceux du patient du médecin mis en cause ?

  • Le médecin du travail accomplit-il une mission d’ordre public ?

En guise d’argumentaire la chambre disciplinaire se contente d’une simple affirmation à la première question et ne réfute pas les éléments de droit et de jurisprudence produits par la défense à l’appui de la deuxième question.

Sont totalement absentes des réponses aux interrogations de la défense sur la nature d’une « instruction » par le Conseil départemental, sur l’impartialité de laquelle on peut légitimement s’interroger:

  • Un conseil départemental peut-il prétendre limiter le droit d’expression d’un justiciable et lui en faire grief en retenant cet argument à sa charge ce qui pourrait relever de l’abus de pouvoir ?

  • Une « conciliation », possible avec un patient, l’est-elle avec un employeur sans mettre en péril la déontologie médicale du fait de possibles :

  •  Atteintes à l’indépendance du médecin du travail en ignorant les garanties réglementaires qui la protège

  •  Risques de transgression du secret médical concernant le patient en litige avec son employeur vis-à-vis d’un tiers

  •  Risques de modification d’un écrit, sous incitation éventuelle, par ailleurs condamnable, de membres du conseil départemental, sans avoir reçu à nouveau le patient

Dans son souci de soutenir la position du plaignant-employeur, la chambre disciplinaire va jusqu’à reprocher au Dr HUEZ « d’avoir porté sur les conditions de travail (du) salarié une appréciation comportant des qualifications de nature pénale » ainsi est interprétée le « défaut d’engagement des obligations de santé de résultat d’un employeur » signalé par le Dr HUEZ. En prétendant cela la chambre disciplinaire rend impossible tout constat du lien santé-travail. Car, en l’occurrence, toute mise en lumière du lien entre des éléments du travail et leurs effets délétères sur la santé, qui relève pourtant des obligations réglementaires du médecin du travail tombent sous le coup de cette qualification puisqu’ils engagent la responsabilité des employeurs.

Il en est ainsi par exemple du certificat de maladie professionnelle, mais aussi de dispositions du code de la sécurité sociale qui engagent tout médecin à signaler les étiologies professionnelles d’atteintes à la santé.

La véritable question bien évidemment ne relève pas de juridictions qui paraissent incapables d’analyser le droit et de considérer la question sociale sous-jacente à ces affaires.

Les ordres des médecins risquent de perdre toute légitimité en prêtant le flanc à des accusations de trop grande proximité d’intérêt avec les employeurs. Depuis le jugement concernant le Dr HUEZ, deux autres médecins du travail, trois praticiens de soins viennent de s’ajouter à la liste de nos trois confrères contre lesquels des employeurs ont porté plainte devant l’ordre. Les employeurs s’engouffrent dans la brèche.

La question relève dorénavant de la responsabilité politique de l’Exécutif. Il est urgent qu’il agisse.

Alors qu’une loi sur la protection des lanceurs d’alerte est entrée en vigueur en avril 2013 ne s’appliquent elle pas aux médecins ?

Ce gouvernement veut il assumer la responsabilité d’une disparition de la médecine du travail ? Veut-il liquider la possibilité pour les travailleurs d’accéder à leurs droits légitimes et à une juste réparation des atteintes à la santé liés au travail ? Tient-il à se priver de toute visibilité sur les effets du travail sur la santé ?

On pourrait le croire devant l’attentisme dont il fait preuve, alors qu’une infime rectification d’un décret, modifié à la sauvette par la mandature précédente, pourrait rétablir une situation plus conforme aux principes de protection de la santé des travailleurs, en conditionnant toute plainte de cette nature à la voie judiciaire.

 

Pour signer la pétition :

http://www.petitions24.net/alerte_et_soutien_aux_drs_e_delpech_d_huez_et_b_berneron

 Alain CARRE

Lire let imprimer :

 

18 Décembre  2013

Que nous a appris l’audience de la chambre disciplinaire du 18 décembre ?

Un point de la situation par le coordinateur de la pétition : Alain CARRE

 

Tout d'abord, que le caractère confidentiel de cette audience, qui favorise un manque de visibilité sociale, peut être contourné par une mobilisation collective.

Bien que le Président ait tenu à rappeler le caractère écrit de la procédure, sans nul doute, la présence d'un public militant et l'expression publique des témoins, des avocats et de Dominique Huez ont permis de donner un tout autre relief à ce qui s'avérait être une formalité. En témoignent l'intérêt des médias pour cet évènement.

Il faut remercier toutes celles et ceux qui se sont mobilisés le 18 car c'est grâce à leur présence que ces instances ne seront, sans doute, plus jamais les mêmes.

 

Concernant le fonctionnement des juridictions de l’ordre plusieurs questions sont maintenant posées publiquement et le législateur devra y répondre :

  •  Un conseil départemental est-il obligé de transmettre la plainte d’un employeur ?

  •  La procédure de conciliation, compréhensible lors d’un conflit entre un médecin et son patient, est-elle adaptée à un conflit entre un employeur,

  •  S’il transmet la plainte, un conseil départemental, peut-il se liguer avec le plaignant employeur, sans lier son sort à ce dernier ?

  • les juges ordinaux possèdent ils tous les éléments de compréhension, dès lors que le médecin justiciable n’appartient pas au secteur de soin?

  •  peut-on faire juger dans le cadre d’une plainte d’employeur un médecin salarié par des médecins-employeurs sans courir le risque de conflit d’intérêt ?

Concernant les pratiques médicales les témoignages ont clairement démontré que :

  • un médecin, a fortiori médecin du travail, peut parfaitement identifier ce qui dans le travail d’un salarié a été à l’origine d’une atteinte à la santé et il peut rédiger un écrit qui décrive le lien entre les caractéristiques du travail et ses effets sur la santé ;
  • les droits des salariés à ce constat sont garantis constitutionnellement et réglementairement par le code du travail et de la santé publique, et que le devoir d’un médecin est d’assurer l’accès à ce droit ;
  • cette capacité repose sur le déploiement  de pratiques cliniques fondées sur une clinique particulière : « la clinique médicale du travail », plus spécifique à l’exercice de la médecine du travail, mais accessible à d’autres exercices notamment psychiatriques
  • en laissant sur son site un rapport, où il est signifié une interdiction d’attester du lien santé-travail, le Conseil national prend le risque de se voir reprocher un excès de pouvoir, d’une part en empiétant sur les pratiques spécialisées des médecins du travail, hors des compétences que lui assigne la Loi, et d’autre part en interprétant abusivement l’article R4127-51 du code de la santé publique au détriment des articles R4127- 9, 50, 59 et 95 du même code.
  • en ne  retirant pas ce rapport, alors que le lien entre les effets sur la santé mentale du travail est dénié, le Conseil national prend le risque d’aggraver cet excès de pouvoir par un défaut de compétence puisqu’il il ne tient pas compte de l’évolution des connaissances dans ce domaine.

Juridiquement, les plaidoiries des avocats de Dominique Huez, Maître Teissonnière et Maître Topaloff ont clairement démontré :

  • Le caractère très particulier d’une juridiction disciplinaire, spécifiquement instituée dans l’intérêt des patients et où, en l’espèce, le patient aurait été totalement absent des débats si le Dr Huez et ses conseils n’avait évoqué sa réalité. Ainsi ont été démontrés l’inadaptation, le détournement et l’instrumentalisation de cette instance professionnelle par les plaintes d’employeurs.
  • la distance de cette juridiction professionnelle par rapport aux garanties de droit des juridictions judiciaires, dès lors qu’il y fut constaté que l’avocat des employeurs s’est abstenu de verser au dossier des preuves matérielles des faits allégués reprochés au Dr Huez
  • Mais principalement, sur le fond, d’une part la nature de mission d’ordre public des médecins du travail qui réserve leur mise en cause devant une juridiction professionnelle à l’autorité publique et d’autre part l’illégalité de la procédure de plainte d’un employeur à l’Ordre des médecins dès lors qu’il ne représente pas l’intérêt d’un salarié mais agit pour son intérêt propre.

Politiquement cette audience revêt, par conséquent, une grande importance :

 Alors que la stratégie des employeurs, à travers plusieurs plaintes, est de terroriser les médecins du travail pour les empêcher d’écrire sur les effets des risques psychosociaux, la mobilisation et l’intérêt des médias pour cette affaire devraient les faire réfléchir sur le danger de stigmatisation publique de ce mauvais procédé.

Il faut aussi que les salariés soient, de leur côté, plus exigeant en matière d’alerte et des constats individuels et collectif, dorénavant devenus obligatoires, de la part de leur médecin du travail.

 Les ministres responsables de la santé et du travail ne peuvent continuer à faire comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur de mondes. Ils ont déjà été interrogés et nous réitèrerons de façon encore plus précise nos questions sur les points de droit soulevés par les avocats.

 Cela implique que nous restions tous mobilisés, que nous appelions tous les salariés et leurs organisations à signer la pétition et que nous participions, au moins à la hauteur de ce qui s’est fait à Orléans, à la défense de tout médecin injustement mis en cause s’il le désire.

 Rien n’est gagné à ce jour. Ce n’est qu’un début... !

 Signer les Pétitions :

Soutien aux trois médecins du travail :

http://www.petitions24.net/alerte_et_soutien_aux_drs_e_delpech_d_huez_et_b_berneron

Soutien au Dr Rodriguez

http://csdr.fr/wp/petition/

 

Télécharger/imprimer le texte : 

 

07 Aout 2013

UN POINT DE LA SITUATION PAR LE COORDINATEUR DE LA PETITION

 Au 07 Aout 2013 La pétition a recueilli :

  • ·         9485 signatures

  • ·         dont 811 Médecins du travail

  • ·         dont 103 contrôleurs, inspecteurs, directeur du travail

 Le coordonnateur de la pétition remercie très chaleureusement toutes et tous les signataires qu’ils soient collègues ou consœurs et confrères des médecins mis en cause et plus encore s’ils sont profanes et si ils représentent des associations es qualité. Une mention particulière aux syndicalistes dont l’adhésion revêt une importance dans des temps troublés où leur soutien à des membres de la profession ne va pas toujours de soi. Comme coordonnateur, et ceci n’engage que moi, j’estime que signer pour cette pétition démontre un haut niveau de réflexion sur les rapports que la santé entretient avec le travail.

 Bien évidemment, nous ne sommes pas restés passifs. Un collectif d’organisation s’est constitué. Des courriers ont été adressés au ministre du travail et au ministre de la santé pour demander une rencontre et présenter la pétition. Des réponses des cabinets ministériels nous sont parvenues indiquant que nos demandes sont à l’étude.

 La rentrée se profile. Que devient la situation des trois médecins du travail en cause ?

Le Dr DELPUECH attend la notification de l’appel au conseil national  concernant la décision de blâme infligée par le chambre disciplinaire régionale de l’ordre.

Le conseil départemental de l’ordre d’Indre et Loire qui avait convoqué, sans l’entendre, le Dr BERNERON pour une « conciliation » avec l’employeur qui l’accusait, c’est aperçu, in extremis, qu’il n’était pas compétent ! En effet, ce médecin est inscrite à l’ordre des médecins du Loir et Cher. Ce conseil de l’ordre a, lui, engagé un dialogue confraternel avec le Dr BERNERON et organise une réunion de conciliation « conformément à la loi en vigueur », le 19 septembre.

Cet incident a, pour le moins, mis en lumière un fonctionnement un peu surprenant du conseil de l’ordre tourangeau.

Le Dr HUEZ a refusé de se présenter à la conciliation avec l’avocat de l’entreprise plaignante. Le conseil de l’ordre d’Indre et Loire a transmis la plainte de l’entreprise à la chambre disciplinaire de l’ordre des médecins, assortissant la saisine de commentaires particulièrement négatifs qui pourraient être le signe d’une partialité, sur la nature de laquelle il est permis de s’interroger. En effet, la plainte n’a pas été déposée à son initiative mais il s’y associe, liant ainsi son sort à celui de l’entreprise plaignante.

 Les raisons du refus de conciliation du Dr HUEZ ont été exposées par ses conseils :

La plainte de l’entreprise n’est pas recevable pour des raisons de droit car elle n’est pas accompagnée de la délibération de l’organisme statutairement compétent de l’entreprise, les employeurs mésusent de l’article permettant de porter plainte dans la mesure où ils ne sont ni liés au régime de sécurité sociale, ni représentent pas les patients, enfin l’inspecteur du travail a confirmé que le Dr HUEZ agissait dans un cadre de droit et accomplissait bien une mission d’ordre public et que par conséquent l’entreprise ne pouvait porter plainte hors de toute plainte de l’autorité publique.

Le mémoire envisage principalement le point essentiel que constitue l’attitude générale des institutions ordinales en matière  d’exercice de la médecine du travail et la confusion entre la situation professionnelle et l’appartenance à une communauté familiale. Il souligne l’incompréhension des pratiques en médecine du travail et notamment l’établissement et la formalisation du lien entre la santé du travailleur, y compris psychique et des caractéristiques  du travail ou de son organisation. Il souligne au passage que ce lien avait été préalablement attesté par la reconnaissance d’un accident du travail dont le salarié avait été victime.

L’argumentaire fait une place aux commentaires du conseil départemental d’Indre et Loire qui, au passage qualifie «  d’instruction » son action dans ce domaine alors qu’il ne cite en l’occurrence aucun article du code de déontologie médicale à l’appui de ses accusations ! Les griefs avancés  par cet organisme pourraient être considérées comme attentatoires à la liberté d’expression et méconnaissent les droits juridiques de la défense. C’est à un non lieu de la chambre disciplinaire qu’invite ce mémoire.

l’audience de la chambre disciplinaire serait fixée au mercredi 16 octobre au matin à Orléans. Mais elle pourra être repoussée selon l’évolution de l’instruction écrite en cours

 Ainsi, la machine disciplinaire étant en marche il convient d’accompagner, y compris en personne, les trois médecins devant les instances disciplinaires. C’est pourquoi nous appellerons à nous rassembler à chaque occasion afin de remettre la pétition à ces instances et apporter notre soutien aux trois médecins concernés. Je ne doute pas un instant que nous serons nombreux.

Je réitère mes très cordiaux remerciements à toutes et à tous.

 Alain CARRE

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